Osez le Groupe ! Trouvez de nouvelles idées

Jean-Paul Salmon est producteur de lait avec son épouse dans la Manche. Président des CRDA du département, équivalents des GVA du Morbihan, il s’est lancé dans une aventure toute particulière voilà plus de deux ans : lancer une filière chanvre de la production jusqu’à la transformation et la commercialisation des produits.

Invité à l’Assemblé Générale de l’Union des GVA le 29 novembre 2011 à Carentoir, Jean-Paul Salmon retrace le parcours des groupes qui ont relevé ce défi. Agriculteurs et industriels réunis pour le développement économique local

 

Passionné de développement et d’action collective, Jean-Paul Salmon porte haut les couleurs de ses groupes de développement. Depuis 2010, il préside une association de producteurs de chanvre qui est passée, de fil en aiguille, de la culture du chanvre pour approvisionner une filière de transformation locale à la reprise de la société de transformation par les producteurs. Le chanvre est une culture facile à conduire, avec peu d’interventions et de nombreux intérêts agronomiques. Seule l’étape de récolte s’avère plus délicate. Mais pour les producteurs, l’avantage de cette culture tient surtout à ses multiples débouchés à forte valeur ajoutée. La fibre se retrouve ainsi dans des matériaux d’isolation et de plasturgie. Dans le Sud Manche, l’entreprise Agro¬chanvre s’est spécialisée dans l’extrusion plastique à partir du chanvre. Elle s’est tournée vers la Chambre d’agriculture et les groupes de développement pour développer une filière locale non ali¬mentaire autour du chanvre. Sollicités par l’industriel, les agriculteurs se sont rapidement fédérés pour approvisionner l’entreprise, passant de 15 ha cultivés en chanvre à la production de plus de 400 ha.

Des producteurs à la tête d’une filière locale

Mais en 2010, confrontée à des difficultés financières, l’entreprise se tourne vers ses partenaires agricoles. Un audit technico-économique est alors co-financé par la Chambre d’agriculture et le Conseil général de la Manche. Dans le même temps, les agriculteurs du groupe de développement prospectent pour voir comment la filière pourrait se structurer. Se pose alors la question de remonter financièrement l’entreprise en recapitalisant… Les agriculteurs producteurs de chanvre se disent finalement : « et pourquoi pas nous ? » Ils relèvent alors ce pari fou de reprendre les rennes de l’entreprise, d’en devenir ainsi les gestionnaires et de maîtriser l’ensemble de la filière chanvre de la Manche, depuis la production jusqu’à la transformation et la commercialisation. Pour le territoire, le challenge est de taille : maintenir une activité économique locale et des emplois pour l’avenir. Pour le groupe, cette initiative portée par des valeurs collectives et partagées entre les producteurs a nécessité de se professionnaliser, notamment pour formaliser des contrats entre les différents acteurs.

Jean Paul Salmon (Deuxième à droite lors de l'AG 2011 de l'UDGVA)

«Etre acteur de ses choix et de ses décisions »

Pour les agriculteurs fédérés en groupe, plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette expérience audacieuse. Suite au témoignage passionné de Jean-Paul Salmon, Dominique Loubere, responsable d’antenne sur Ploërmel, ressort les ingrédients nécessaires aux groupes de développement pour être acteurs de leur territoire, de leurs choix et de leurs décisions :

• Déjà, il est indispensable d’être à l’écoute des besoins, des idées et des projets qui émergent sur le territoire.

• Pour cela, il faut être présents dans les réseaux et être reconnus par les autres acteurs économiques et territoriaux comme acteurs et porteurs d’initiatives de développement.

• Pour mobiliser et fédérer les agriculteurs, il convient de fonctionner en collectif et de travailler en mode « projet »

• Pour développer des projets, tous les acteurs doivent y trouver un intérêt et bénéficier de la valeur ajoutée. Jean-Paul Salmon le souligne à plusieurs reprises : « Toujours avoir dans le viseur l’intérêt économique pour tous les acteurs », pour les agriculteurs mais aussi plus largement pour le territoire. C’est la base même du succès de la filière.

• Enfin, il faut formaliser les relations entre les différents acteurs et veiller à ce que chaque maillon du projet se trouve suffisamment valorisé.

Enfin, lorsque l’on interroge Jean-Paul Salmon sur les ingrédients nécessaires à la dynamique ?

De l’énergie et une forte motivation ! Et puis, il faut oser ! C’est un défi qui trouve parfaitement écho dans la célèbre citation de l’écrivain Marc Twain: « ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »

Pour en savoir plus : Aurélie RIO, Union des GVA 02 97 46 22 83

 

 

 

L’Agriculture Ecologiquement Intensive : une opportunité pour les groupes de développement

Effet de mode ? Véritable ligne pour l’agriculture de demain ? L’Agriculture Ecologiquement Intensive (notée AEI) fait couler de l’encre, soulève quelques débats et interroge les agriculteurs.

Mais une fois le concept décrypté, s’ouvrent tous les champs du possible pour produire demain tout en ayant moins de ressources disponibles. Alors, saisissez l’opportunité d’explorer ensemble de nouvelles voies !

Historique et base du concept

Evoqué pour la première fois en 2007 par Michel Griffon, chercheur à l’INRA dans le cadre du Grenelle de l’environ­nement, le pari de l’AEI repose sur l’idée de « produire mieux avec moins » en tirant le meilleur parti de la nature dans un contexte où les ressources naturelles (eau, sol, énergie,…) se raréfient.

Produire plus et mieux avec moins?

A l’échelle mondiale, l’agriculture devra nécessairement produire plus pour nour­rir 9 à 10 milliards d’hommes en 2050. Mais au niveau européen, il s’agit surtout de maintenir les niveaux de production pour répondre aux besoins des consom­mateurs tout en réduisant l’utilisation d’intrants et de ressources non renou­velables. L’enjeu est double : rémunérer le travail des producteurs dans le cadre d’outils de production viables économi­quement et socialement et préserver les ressources environnementales.

Un coup de peinture verte ?

Michel Griffon répond : « Les idées n’ap­partiennent à personne. Tout dépend du sens que l’on donne à l’action. » Il serait stérile de juger le concept lui-même. Il faut surtout y voir un sujet qui redonne du sens au métier d’agriculteur et qui invite à progresser et à explorer de nouveaux champs pour l’agriculture de demain.

Une démarche globale

L’AEI ouvre la voie à de nombreuses investigations et invite les agriculteurs à revisiter leur système dans sa globalité : techniques de travail du sol, allongement des rotations, valorisation des fourrages, sélection génétique, économie d’énergies en bâtiment, valorisation des effluents d’élevage, aménagement parcellaire…

Une démarche de progrès

L’intérêt de l’AEI réside avant tout dans la démarche de progrès dans laquelle chaque producteur peut s’inscrire. Loin d’être un cahier des charges précis, un label ou un référentiel qui indique­rait la marche à suivre, l’AEI se pose en guide : tous les systèmes de production peuvent y trouver des ressources pour progresser en conjuguant économie et écologie.

Une démarche stratégique

Qu’elle soit de précision, à haute valeur environnementale, biologique, de conser­vation ou durable, l’agriculture nourrit les hommes et entretient avec son environ­nement des liens particulièrement étroits. Au-delà d’associer de façon paradoxale écologique et intensif, l’AEI est l’occasion pour chaque producteur d’affirmer sa stratégie de production face aux enjeux sociétaux et environnementaux. Il revient aux producteurs de fixer leurs propres objectifs d’évolution en suivant leurs motivations et les valeurs impor­tantes de leur métier. Ils analysent ensuite l’environnement de l’entre­prise agricole en identifiant ses atouts, contraintes, opportunités et menaces. A partir de là, il ne leur reste plus qu’à se mettre en action pour atteindre les objec­tifs !

La force du groupe pour progresser

Les groupes d’échanges techniques et prospectifs représentent un cadre idéal pour s’approprier les enjeux de l’AEI et explorer de nouvelles pistes de dévelop­pement. Le travail collectif sur la notion d’AEI peut intervenir à plusieurs niveaux de la réflexion :

• en découverte, avec l’intérêt des échanges au sein du groupe, l’ouver­ture aux multiples visions que chaque participant peut apporter.

• en formation approfondie sur les thé­matiques que l’AEI peut recouvrir : le contenu des thématiques peut être défi­ni collectivement et chaque participant fixe ses objectifs individuels, au regard de son propre système. Il se positionne au regard de ses pratiques actuelles et se fixe des étapes pour améliorer les pratiques sur lesquelles il souhaite progresser.

La plus-value du groupe repose sur l’effet « miroir » des expériences individuelles partagées en groupe. Effet de mode ? Récupération commer­ciale ? Coup de peinture verte quelques années après des démarches « agricul­ture raisonnée » avortées ? Finalement, peu importe ! Pour les agriculteurs, c’est une nouvelle opportunité de réflexion à saisir pour se projeter vers les agricul­tures de demain. Pour conduire cette réflexion, le groupe de développement garantit l’enrichissement de chacun par le partage d’expériences, le questionne­ment et l’échange.

Pour en savoir plus :   Aurélie RIO  Union des GVA – 02 97 46 22 83

Voir aussi http://www.aei-asso.org/